Condamner à ne rien entendre. C’était comme ça que les parents d’un petit garçon encore dans le ventre de sa mère était décrit. Il ne portait pas encore de nom qu’il était déjà condamné à avoir une vie différente de tout ce qu’on s’attend. Pourtant, à sa naissance, il n’avait pas d’autres problèmes de santé. Un petit roux, délicat et criard, contrairement aux attentes. Enfant normal, curieux même... Sans audition. Enfant sociable, amical, souriant. C’était un charme, si on oubliait ce fâcheux défaut dont les parents entendaient constamment parler... Et puis, ils ont décidé que tout allait changer. Leur mentalité entourant la surdité. Ils apprenaient la langue des signes pour aider leur fils, à cette époque, leur seul enfant. Les possibilités pour une opération avec un implant cochléaire étaient déjà invoquées alors qu’il n’était qu’un bambin... En âge raisonnable, il refusait. Pourquoi? Parce que pour lui, il avait une vie normale. Il s’était toujours bien intégré aux groupes. Il faisait le clown, gentiment. Il se faisait apprécier par ses amis, ses collègues, malgré toute l’attention constamment sur lui. Une porte, ça fait du bruit quand on la claque... Le rouquin ne l’a su qu’à l’âge de 9 ans... Et encore aujourd’hui, il lui arrive d’être plus bruyant que ce qu’il ne croit.

Une vie facile, une vie heureuse. C’était ça être avec Basil. Il n’y avait que rarement de complications avec lui. Il s’impliquait dès l’adolescence auprès de causes, principalement celles reliées à la santé, à la surdité même. C’était son combat après tout, de faire tomber les barrières... S’en est suivi des thérapies de la parole avec une audiologiste... une audiologiste très canon pour tout vous dire... Après avoir appris à parler correctement, où Basil s’est mis en tête de très bien réussir, il voulait la charmer. Et il l’a fait, la ramenant entre ses draps à quelques reprises. Il a arrêté les thérapies par la suite... Vous comprendrez qu’il y a trouvé son compte. Il sait parler, mais n’aime pas particulièrement le faire. Il préfère garder le silence et puis maintenant, c’est loin... Et c’est pas beau entendre parler un sourd, selon ce qu’on lui a déjà fait comprendre. Muet comme une carpe, il sera alors.

Basil réussit bien à l’école, il s’implique pas mal... Ses sœurs jumelles cadettes l’ont inscrit à l’université et il se retrouve avec une lettre d’acceptation entre les mains sans avoir le comment du pourquoi, parce qu’il est con, Basil. Pour la première fois depuis des années, on l’entend gueuler : « PRIMROSSE, MYRRRTLE. » Les jumelles accourent. Et pour la première fois, Basil leur fait des menaces. Il n’est pas du tout content de se retrouver avec cette option. Parce que lui, il veut partir. Loin. Il ne veut pas faire le tour du monde, il veut simplement partir pour Marple Spring. Une petite ville où un vieil ami y est... Ça, c’est la raison officielle. La raison non officielle, c’est qu’il a vu une fille sexy comme mille sur Tinder. Il s’est mis en tête de la retrouver... Ça et puis, c’est une bonne fuite de l’université. Ses parents lui demandent comment il va y arriver financièrement, mais Basil, il est pas con. Enfin, il l’est, mais pas tant que ça. Il a cumulé un bon nombre de bourses lui assurant au moins une année couverte financièrement. Après, comme il ne va pas à l’université, ça l’aidera bien avec le dur chemin de la vie...

Depuis maintenant deux ans, on croise Basil dans la discothèque à servir des cocktails, des bières, des shots. On le voit donner son show chaque soir avec la musique, on le voit se déhancher sur le daaaancefloor. Un bon nombre de ses collègues ont même appris quelques signes pour l’aider dans ses tâches parce que Basil, il est gentil. Basil aide tout le monde, Basil aime tout le monde et le monde entier le lui rend bien. Il a un cœur gros comme l’univers. Puis Basil, il attire les filles... Les hommes aussi parfois. Il leur apprend quelques signes dus à la curiosité qu’ils ont, puis en jouant au charmeur, il se les ramène. Apparemment, elles sont pas bruyantes... Ou il l’ignore, en tout cas. Et c’est pas plus mal, parce qu’il se plait à Marple Spring. Il a des amis après 2 ans... Il a la deuxième famille du bar, il a une affection malsaine avec certaines clientes. Il est pas plus mal là où il est le rouquin. Son propriétaire a même aidé à aménager le logement, en échange, il lui fait quelques rénos gratis... Pourquoi pas. Sweet life in Marple Spring.