Je me sentais très stressé, depuis quelques jours. Et pour une fois, j'avais de bonnes raisons. D'habitude, j'avais tendance à m'inquiéter pour tout et rien, et de façon exacerbé qui plus est. Mais cette fois, je savais que mon stress était légitime. J'avais décidé de demander Abby en mariage. Ce n'était pas rien, tout de même ! J'y avais beaucoup réfléchi -je n'étais pas du genre à prendre des décisions impulsives. J'étais complètement amoureux d'elle. Je n'avais pas honte de l'avouer. Je m'estimais très chanceux d'être avec une femme aussi incroyable. Elle était entrée dans ma vie à un moment où rien n'allait. Mes parents venaient de mourir, j'avais du rapatrier ma soeur de Nouvelle-Zélande jusque ici… J'avais eu l'impression de perdre complètement le contrôle de ma vie, à cette période, et c'était bien la première fois que cela m'arrivait. Mais Abby avait été là et m'avait soutenue. Elle était incroyablement forte malgré sa petite taille. Abby était mon pilier et j'avais envie de sceller cela de façon officielle. J'avais toujours rêvé d'avoir une petite vie rangée, tranquille, d'avoir une femme et des enfants. Abby était la femme avec qui je voulais vivre tout cela. Je lui avais donc donné rendez-vous au parc où nous nous étions rencontrés, il y a presque deux ans. La nuit était tombée et, heureux hasard, le ciel était dégagé. Elle me rejoignit à l'heure exacte que je lui avais donné. Comme d'habitude, elle était magnifique. Des traits fins et élégants. Je m'approchais d'elle et l'embrassai tendrement. « Hey. Ça va ? » demandai-je doucement en souriant. J'étais très stressé mais je tentais de ne rien faire paraître. Je comptais attendre le moment opportun pour lui demander, je n'allais pas faire cela de but en blanc. « Excuse moi de t'avoir donné rendez-vous si tard, mais je suis vraiment débordé ces derniers temps… et puis, j'ai pensé que ce serait plus joli à la nuit tombée » précisai-je. « Tu te rappelles de cet arbre ? C'est stupide, hein, mais moi, je m'en souviens parfaitement. On était là précisément quand on s'est rencontrés » dis-je en pointant un arbre à ma gauche.
Abby était, comme à son habitude, très jolie. Je soupçonnais qu'elle avait passé sa journée au salon, car son maquillage était littéralement impeccable. Je cross que ce qui m'avait le plus impressionné chez elle, lorsque nous nous étions rencontrés, était ce mélange ingénieux de raffinement et de naturel qui se dégageait d'elle. Abby était une femme entière, pleine, vivante. Elle n'était jamais superficielle, toujours honnête et j'admirais cette qualité. Dès le début, sous ce même arbre, nous nous étions très bien entendus. J'avais aimé sa maladresse. J'avais toujours pensé que le coup de foudre n'existait pas, ou du moins que c'était exagéré, mais en réalité, c'était ce qui s'était produit avec Abby. Je ne m'en étais pas rendu compte tout de suite, je pense, mais à peine étais-je parti que je voulais déjà la revoir. Le destin peut être un sacré chien, quand même ; j'avais rencontré Abby le jour où j'avais appris la mort de mes parents. Le pire et le plus beau jour de ma vie. Forcément, j'avais du prendre le premier avion direction la Nouvelle-Zélande pour retrouver ma soeur et organiser les funérailles, mais malgré tout cela, Abby ne m'était pas sortie de la tête une seconde. C'était assez incroyable, quand j'y repensais. La jeune femme semblait contente de me voir. Je l'attrapais par la taille et lui demandais si elle se souvenait de cet arbre. Notre arbre, en dessous duquel nous nous étions rencontrés. « Bien sur que je m'en rappel, comme si s'était hier ! Tu sais parfaitement que ça n'a rien de stupide chéri, j'adore cet endroit et encore plus cet arbre. Et je trouve ça très romantique que tu m'es donnée rendez-vous ici ce soir » Sa remarque me fit sourire, et elle m'embrassa. Je la serrai plus fort. J'étais vraiment très heureux d'être avec elle. Et très stressé en même temps. Le baiser prit fin, et soigneusement, je me mis à chercher les mots. J'étais journaliste, après tout, je savais comment mener une argumentation. Mais dans ce contexte précis, j'avais l'impression que les mots jouaient à cache-cache dans mon cerveau. « Tu sais, Abby, je te serais éternellement reconnaissant d'avoir été là pour moi, pendant ces mois que nous avons passés ensemble. Sans toi, je pense que j'irais vraiment mal » commençai-je en la regardant dans les yeux. « Tu es la première femme que j'aime comme je t'aime. C'est tellement fort, tellement puissant… T'es vraiment celle qu'il me faut dans la vie. Je sais que ça ne fait qu'un an et demi, mais… » Et voilà que j'en perdais mon latin. J'avais perdu le fil. Il fallait que je me jette à l'eau !